Ce que je reproche aux thérapies alternatives

Dans un paysage où les options de soins de santé se multiplient, les thérapies alternatives ont gagné en popularité, offrant souvent une approche alternative à la médecine conventionnelle. Cependant, derrière les promesses de guérison et de bien-être, se cachent parfois des réalités moins évidentes. Cet article se penchera sur les aspects souvent négligés des thérapies alternatives, offrant une perspective critique sur ces pratiques.

1. Expérience personnelle et empirisme

L’empirisme est une approche philosophique et épistémologique qui met l’accent sur l’expérience sensorielle directe comme source principale de connaissance. Selon l’empirisme, les connaissances sur le monde sont principalement acquises par l’observation, l’expérience et l’expérimentation. Cette perspective s’oppose à d’autres approches, telles que le rationalisme, qui accordent plus d’importance à la raison et à la déduction comme sources de connaissance.

L’empirisme affirme que notre compréhension du monde est construite à partir de nos interactions avec lui, en recueillant des données par le biais de nos sens, comme la vue, l’ouïe, le toucher, le goût et l’odorat. Ces données sensorielles sont ensuite analysées et interprétées pour former des idées et des théories sur le fonctionnement du monde.

Cependant, il est important de noter que l’empirisme seul ne garantit pas la validité ou l’efficacité d’une pratique ; une évaluation rigoureuse et systématique est souvent nécessaire pour déterminer l’efficacité et la sécurité des thérapies alternatives.

Les biais cognitifs peuvent entraîner une interprétation erronée ou biaisée des données empiriques recueillies par le biais de l’observation et de l’expérience. Par exemple, un chercheur peut être sujet au biais de confirmation, où il tend à rechercher, interpréter et se rappeler sélectivement les informations qui confirment ses propres hypothèses ou convictions préexistantes, plutôt que d’adopter une approche objective.

Pour minimiser l’impact des biais cognitifs sur l’empirisme, il est essentiel de mettre en place des méthodes de recherche rigoureuses, telles que des protocoles expérimentaux bien conçus, des échantillons représentatifs, des analyses statistiques appropriées, et une évaluation critique des résultats. De plus, la sensibilisation aux différents types de biais cognitifs et leur prise en compte dans la conception et l’interprétation des études peuvent contribuer à améliorer la fiabilité et la validité des conclusions empiriques.

J’ai pu voir également que certains professeurs/créateurs de thérapies n’hésitaient pas à se baser sur des intuitions, des rêves ou encore des visions pour améliorer leur thérapies. Je ne sais pas vous, mais personnellement, je ne souhaiterais pas être opérée par un chirurgien qui aurait ce type de démarche.

2. Marque déposée et santé

Cela va peut-être vous surprendre, mais un certain nombre de thérapies complémentaires sont en réalité des marques déposées par leur créateur. Une démarche que je trouve surprenante en tant que diététicienne-nutritionniste. En effet, dans la médecine allopathique, aucune spécialité ou métier n’est une marque. Les termes et pratiques sont définis par la loi et la HAS, mais ils appartiennent à tous et non à une entreprise. Par exemple, c’est le cas de l’Etiopathie, de la Somatopathie et de la Sophrologie qui sont des marques déposées.

Déposer une marque permet au créateur de contrôler/diriger tout ce qu’il souhaite derrière le terme choisi. Souvent, cela passe par un monopole dans la formation et les découvertes de la thérapie en question, ainsi que par l’obligation de respecter les choix du créateur de la marque, sous couvert de perdre le titre, par exemple. Un non-sens à mes yeux lorsque l’on parle de santé pour tous.

3. Opposition avec la médecine allopathique

Les médecines alternatives et complémentaires (MAC) sont bien souvent en opposition avec la médecine scientifiquement vérifiable. J’ai pu observer, en tant qu’ancienne élève, des discours parfois bien loin de la complémentarité indiquée sur le papier. Certains partisans des thérapies alternatives peuvent décourager les patients de recourir à des traitements médicaux conventionnels, ce qui peut mettre leur santé en danger. Un discours que l’on retrouve bien souvent dès la formation (du moins, c’est mon vécu), dans les livres et parfois dans les cabinets lors des consultations.

4. Charlatanisme et médecine alternative

Le risque de charlatanisme est suffisamment élevé pour que la Miviludes s’en mêle.

Dans le contexte des thérapies alternatives, un charlatan est un praticien qui prétend avoir des pouvoirs de guérison ou des capacités spéciales sans aucune base scientifique ou formation légitime pour étayer ses affirmations. Cette personne exploite volontairement la vulnérabilité ou les croyances des individus en leur vendant des traitements inutiles ou même dangereux, tout en profitant financièrement de leur désespoir ou de leur confiance.

Il est important de reconnaître que tous les praticiens des thérapies alternatives ne sont pas des charlatans. En effet, un charlatan est conscient d’arnaquer la personne en face d’elle, et je suis convaincu que la plupart des thérapeutes ne sont pas dans cette démarche.

La Miviludes ( Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires ) est une entité gouvernementale française créée en 2002. Son objectif principal est de prévenir et de lutter contre les dérives sectaires. Elle souhaite ainsi protéger les individus contre les risques liés à ces mouvements.

Dans le cadre de ses activités, la Miviludes surveille également les pratiques et les mouvements relevant des thérapies alternatives. Elle s’intéresse notamment aux pratiques qui peuvent présenter des risques pour la santé mentale, physique ou financière des individus, notamment lorsque des praticiens non qualifiés ou des mouvements sectaires exploitent les personnes vulnérables.

La Miviludes n’est pas opposée en soi aux thérapies alternatives, mais elle intervient lorsque ces pratiques sont associées à des comportements sectaires, à des abus ou à des risques pour les individus. Elle recommande la vigilance et encourage les citoyens à être informés et à se méfier des offres de thérapies alternatives qui ne reposent pas sur des bases scientifiques solides ou qui semblent abuser de la confiance des personnes.

5. Exercice illégale, méconnaissance de certaines professions médicales

Certaines professions dans le domaine des thérapies alternatives sont en réalité dans l’exercice illégal de certaines professions déjà existantes. J’observe une méconnaissance des professions reconnues au profit des médecines complémentaires. Par exemple, un naturopathe qui donne des conseils en nutrition alors que le métier de diététicien est là pour cela. Des coachs ou sophrologues qui vont aider les personnes à gérer des pathologies psychiatriques alors que les psychologues sont là pour cela. Les différentes thérapies manuelles alors que les kinésithérapeutes existent déjà.
Pourquoi choisir un thérapeute non reconnu avec un bagage de connaissances plus aléatoire qu’une profession déjà existante où les connaissances sont contrôlées par l’État ? Pourquoi choisir de suivre une formation non reconnue alors qu’une formation dans le même domaine existe et permet de devenir un professionnel de santé ?
Un diplôme reconnu permet de mieux travailler avec les médecins et les autres professionnels, permet d’avoir accès à de nombreuses autres formations universitaires pour se spécialiser, permet également d’avoir plus facilement accès à la recherche.

6. Manque de connaissance

Les thérapies alternatives peuvent parfois être perçues comme ayant un manque de connaissance sur le corps humain, principalement en raison de leurs approches non conventionnelles par rapport à la médecine occidentale traditionnelle. La formation peut différer selon les organismes. Je pense qu’il est important de ne pas généraliser, mais ce manque de connaissances peut se ressentir en consultation et dans les interprétations données. Un socle de base obligatoire, comme en Suisse, pourrait être intéressant à mettre en place.

7. Discours trompeur en médecine

Dans un paysage où les thérapies alternatives sont de plus en plus populaires, il est crucial de rester vigilant face à un discours parfois trompeur. Les termes tels que « naturel » et « holistique », par exemple, peuvent engendrer une fausse impression de sécurité et d’efficacité universelle des traitements alternatifs. Aujourd’hui, aucune thérapie (reconnue ou non) n’est sans risque et n’est efficace pour toutes ou presque toutes les pathologies. Un argument qui, à mon sens, doit alerter lorsque l’on cherche un thérapeute. L’absence de contre-indications peut indiquer un manque de connaissance sur les limites de la thérapie et sur les maladies.

8. La démarche scientifique dans les thérapies

La démarche scientifique implique généralement une série d’étapes, telles que la formulation d’une hypothèse, la conception d’une étude contrôlée, la collecte de données, l’analyse des résultats et la publication des conclusions dans des revues scientifiques évaluées par des pairs.

Dans le domaine des thérapies alternatives, il peut y avoir un manque de recherche scientifique rigoureuse pour étayer les revendications d’efficacité et de sécurité. Cela peut être dû à divers facteurs, tels que le manque de financement pour la recherche, la difficulté à concevoir des études contrôlées pour des interventions souvent complexes, ou encore des biais culturels et philosophiques qui peuvent influencer les praticiens de ces thérapies.
Le manque de connaissance sur la démarche scientifique peut aussi venir compliqué la discussion avec les professionnels de santé et les scientifiques.

9. Formation non reconnu et non validé

Les médecines complémentaires ne sont pas reconnues et cela implique donc des formations très variables en termes de quantité et de qualité. Par exemple, il existe de nombreuses formations en naturopathie (cela peut aller de quelques week-ends à une formation sur plusieurs années, rarement à temps plein). Les stages sont également variables. Impossible de réaliser un stage dans le milieu hospitalier. Pas d’examen national pour valider les connaissances. Le niveau des thérapeutes s’en trouve donc impacté selon la formation choisie.

10. Le prix à payer, business

Comme partout, c’est un business parfois très juteux. Les écoles de formation remplissent les poches de leurs créateurs et les consultations sont parfois vendues à prix d’or. Bien sûr, tout travail mérite salaire, on ne vit pas d’amour et d’eau fraîche. Mais une consultation à plus de 100€, par exemple, me paraît difficile pour permettre l’accès aux soins pour tous. Pas de remboursement possible par la sécurité sociale (certaines mutuelles si). Il faut savoir bien sûr que le prix dépendra du temps que le professionnel vous accordera et que contrairement aux professions de santé, la TVA s’applique. S’il y a du business dans la médecine allopathique aussi, on oublie parfois que cela s’applique aussi aux thérapies naturelles. Une vraie poule aux yeux d’or pour certains. Aujourd’hui, on peut voir des centres/hôtels dédiés aux thérapies alternatives se créer avec un véritable business autour (plusieurs milliers d’euros pour jeûner dans un centre, par exemple). La prudence est de mise.

Pour terminer

Je pense qu’il est crucial d’être vigilant et de faire preuve de discernement lors du choix d’un praticien ou d’une méthode thérapeutique, en recherchant des preuves de leur efficacité, en vérifiant leurs qualifications et en se méfiant des promesses de guérison miraculeuse ou rapide. Si vous suspectez qu’un praticien pourrait être un charlatan, il est préférable de consulter un professionnel de la santé qualifié ou une autorité compétente pour obtenir des conseils et une orientation appropriés. Vous pouvez également faire des signalements à la Mivilude.

Bien sûr, l’engouement pour les médecines alternatives et complémentaires implique également que la médecine allopathique a des défauts (prochain article) et que les médecines alternatives et complémentaires ont aussi des avantages

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Christine Savalli
Diététicienne Nutritionniste En ligne

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